Messages irresponsables présentés comme des voeux du temps des Fêtes
Mesdames et Messieurs les membres du Syndicat,
C’est avec beaucoup de surprise et d’incrédulité que j’ai ouvert votre récente carte aux députés et aux sénateurs. Comme vous le savez, j’ai pour pratique de toujours aborder les questions avec lesquelles je ne suis pas d’accord de façon claire et directe. Malheureusement, puisque personne n’a signé la carte, il n’est pas évident de savoir à qui, au sein de votre organisme, je devrais adresser mes préoccupations. Je ne doute aucunement que vous diffuserez cette information aux responsables de la création et de la distribution des cartes ainsi que des faux stylos-seringues remplis de sang.
Votre syndicat représente des agents correctionnels, dont la plupart sont fiers d’être de parfaits professionnels des services correctionnels, d’où ma surprise quand j’ai lu les renseignements inexacts et trompeurs de votre carte, dans laquelle le projet de Programme d’échange de seringues dans les prisons (PESP) est qualifié de question très préoccupante, et vous critiquez le Service correctionnel du Canada pour sa décision de consacrer des ressources à ce programme « inefficace et dangereux ».
Les programmes d’échange de seringues sont un volet central de la réduction des méfaits. Depuis le début des années 1990, les autorités correctionnelles et sanitaires au Canada et à l’échelle internationale recommandent des initiatives d’échange de seringues à l’intention des détenus. De plus, en réponse aux renseignements erronés que font circuler certaines personnes, l’Agence de la santé publique du Canada a publié en 2006 une étude de l’efficacité ainsi qu’une analyse des risques et des avantages d’un programme d’échange de seringues dans les prisons. Cette étude a permis de révéler que les PESP pouvaient effectivement entraîner la réduction de la transmission du VIH ou du VHC. En outre, un PESP est conforme à la Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances, et s’appuie sur des preuves bien documentées et complètes.
Depuis plus de 30 ans, les taux d’infection par le VIH et le virus de l’hépatite C (VHC) dans les établissements correctionnels sont bien documentés. Le nombre de cas disproportionné est largement attribuable au fait que les programmes et les mesures de soutien aux toxicomanes incarcérés font cruellement défaut, ainsi qu’au partage subséquent de seringues entre ceux-ci. Si l’on ne prend pas au sérieux les risques pour la santé dans les prisons, cela entraînera l’accroissement des risques pour la santé publique de tous ceux qui s’y trouvent (le personnel correctionnel et les détenus), puis, par extension, de la population.
Le PESP vise la mise en oeuvre d’une mesure de réduction des méfaits, afin de permettre de lutter contre la toxicomanie au sein du système correctionnel fédéral. Malheureusement, comme l’a souligné l’enquêteur correctionnel du Canada, et comme vous le soulignez également dans votre carte, la prétendue guerre contre la drogue ainsi que la préférence accordée aux pratiques inefficaces de suppression des drogues exacerbent les problèmes et les méfaits qui découlent de la consommation de drogues en prison.
Le PESP est une mesure essentielle de réduction des méfaits, et nous vous demandons instamment d’être attentifs au rôle que vous devez jouer dans l’accomplissement de votre obligation professionnelle de veiller à la prise en charge et à la garde des détenus aussi bien qu’à la sécurité de la population.
Je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs les membres du Syndicat, l’expression de mes meilleurs sentiments,
Kim Pate, C. M., B.A., B.Ed. P.D.P.P., J. D., M.Sc. Dip., D. U., LL.D. (h.c.)
Sénatrice indépendante